mardi 20 avril 2010

118. Partie 4 : Les luttes des étudiantes et des étudiants de niveau secondaire et postsecondaire

119. La contradiction fondamentale dans la lutte pour un accès réel à l’éducation se fonde sur le fait que : les entreprises veulent une force de travail formée, mais elles ne veulent pas payer pour cela par le biais de leurs taxes, forçant ainsi le peuple à payer pour son éducation par leurs salaires, leurs épargnes et surtout par l’endettement. Les travailleuses et les travailleurs veulent une éducation accessible et émancipatrice.

120. Cette perspective de classe est souvent voilée. La lutte pour l’accès est présentée comme un simple combat universel contre le gouvernement. Les idées démocratiques, épousant les droits sociaux dans le mouvement étudiant, évitent les perspectives de classe et représentent faussement l’État comme neutre. Mais, les décisions étatiques sont généralement en ligne avec celles des banques et des entreprises. Le plus grand nombre de jeunes exclus et rejeté de l’éducation postsecondaire sont souvent des jeunes de la majorité ouvrière.

121. Le mouvement étudiant est vital dans la riposte générale. Il constitue la partie la plus organisée du mouvement de la jeunesse. Les étudiantes et les étudiants sont concentrés sur les campus. L’éducation leur fournit aussi les outils pour la lutte. Toutefois, le mouvement étudiant conserve aussi dans sa direction des éléments hostiles à la classe ouvrière avec les valeurs qui en découlent. Les étudiantes et les étudiants ont donc des attitudes contradictoires et dynamiques.

122. Le programme des entreprises pour le milieu scolaire

123. Depuis la dernière génération, la campagne débridée des entreprises pour les profits a conduit à :

* la restructuration du système fiscal et des relations fédérale-provinciales, réduisant le financement de l’éducation postsecondaire;

* « l’absorption » du secteur public comme nouvelle source de profits par la privatisation.

124. En Colombie-Britannique, par exemple, les étudiantes et les étudiants défraient davantage pour leurs études en 2010 que les entreprises paient en taxes provinciales. C’est de la restructuration pour les seuls riches, pour une éducation de style états-unien.

125. Il y a 30 ans, les frais étaient négligeables ou même nuls! Qu’est-ce qui s’est passé?

* Le rôle du gouvernement fédéral dans le financement s’est traduit par la réduction des transferts de paiement, et il n’est plus nécessaire pour les provinces d’allouer cet argent à l’éducation secondaire et postsecondaire;

* Les frais de scolarité sont devenus une obligation pour l’utilisateur des services, alors qu’ils devraient être gratuits;

* Au printemps 2010, la dette étudiante atteindra $ 13, 500, 000,000;

* Il y a eu des augmentations massives des frais accessoires illégaux (comme « l’accès à la bibliothèque »);

* Les Conseils de direction ont adopté une ligne de plus en plus en faveur des entreprises, en faveur de la privatisation et contre les étudiantes et les étudiants;

* Une petite armée d’étudiantes et d'étudiants travaillent sur ou autour du campus pour les entreprises, et font en fait du travail gratuit.

126. Au Québec, les frais de scolarité sont très bas. Mais le programme de prêts réduit considérablement l’accessibilité. Actuellement, les frais sont les plus élevés en Ontario et en Nouvelle-Écosse. Ils sont gelés à Terre-Neuve.

127. Dans les écoles secondaires, il y a eu des cas similaires de sous-financement et de coupures. En Ontario par exemple, les écoles ont perdu plusieurs milliards de dollars, depuis le milieu des années 1990, en raison de la faillite du programme de financement provincial. Toutes les écoles ont dû faire face à une vague de coupures : personnel de soutien, enseignantes et enseignants, fournitures, entretien et construction de nouveaux bâtiments. Le salaire des enseignantes et des enseignants a été gelé (i.e. 2008 en Alberta) et les conventions collectives déchirées. En Nouvelle-Écosse et ailleurs, les Partenariats privé-public (PPP) dans la construction d’édifice sont surévalués.

128. La privatisation n’est pas seulement une attaque contre les services – coûtant plus et offrant moins parce que les profits doivent être au rendez-vous - mais une attaque contre les travailleuses et les travailleurs. La privatisation attaque les conventions collectives des syndiqué-e-s et détruit leurs syndicats (i.e. la privatisation des services alimentaires sur les campus). Cela renforce la nécessité de l’unité des étudiantes et des étudiants avec les enseignantes et les enseignants et des étudiantes et des étudiants avec les travailleuses et les travailleurs.

129. La résistance au niveau secondaire et postsecondaire

130. Les attaques contre l’éducation ont été repoussées par une résistance acharnée depuis notre dernier congrès. Dans les écoles secondaires, le plus gros de la résistance s’est fait par le biais des enseignantes et des enseignants. Les directions d’école se sont aussi opposées aux coupures de budget et sont placées sous tutelle par les gouvernements provinciaux. La YCL-LJC appuie l’autonomie des commissions scolaires, la démocratie locale et la participation de la jeunesse aux élections des commissions scolaires sur un programme en faveur des enseignantes et des enseignants et des étudiantes et des étudiants.

131. Au Canada anglais, la Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants (CFS) a organisé à travers le Canada une journée d’actions au printemps 2007, mais n’en a pas appelée d’autres depuis. Dans certaines écoles, les étudiantes et les étudiants sont sortis de leurs classes, se sont joints en solidarité aux étudiantes et aux étudiants des universités. Il y a encore à dire sur la situation dans les écoles de métiers de la part de la YCL-LJC.

132. Au Québec, après une grève spectaculaire en 2005, une tentative en 2007 de grève générale étudiante s’est soldée par un échec. Nous en parlerons plus loin.

133. Les actions des fédérations provinciales de la CFS ont été organisées en Ontario et au Manitoba à l’automne en 2008 et en 2009 sous le nouveau et positif slogan « À bas les frais ». Les étudiants du Manitoba ont occupé l’Assemblée législative. Même s’il n’y a pas eu de mobilisation de masse en Colombie-Britannique et ailleurs, ces actions « À bas les frais » sont très significatives. Ils démontrent visiblement la force des étudiantes et des étudiants. Les manifestations doivent être davantage appuyées par la jeunesse et les mouvements populaires, incluant les travailleuses et les travailleurs. Ainsi, cela contribuera à dépasser le lobbying étudiant.

134. Parmi les autres moyens et lieu potentiels de résistance étudiante, il y a :

* Les Groupes de recherche sur l’Intérêt public (PIRGS), souvent la source d’actions inégales et décentralisées, mais aussi un endroit où on retrouve souvent des étudiantes et des étudiants anticapitalistes;

* Les étudiantes et les étudiants « internationaux », les étudiantes et étudiants à plein partiel et les étudiantes et étudiants qui fond un retour aux études;

* Les comités d’étudiantes et d'étudiants fondés sur la nationalité et la défense des minorités ethniques;

* Les comités d’étudiantes et d'étudiants concernés par l’environnement et la justice sociale comme le Mouvement étudiant chrétien;

* Les professeur-e-s d’université (trop souvent absents des manifestations) et l’Association canadienne des professeurs d’Université (CAUT);

* Les chargé-e-s de cours dont les actions ont été dynamiques surtout à l’Université de York.

135. Une plus grande participation des étudiantes et des étudiants dans les affaires de l’université est nécessaire contre la prise de contrôle des corporations sur l’éducation. Les travailleuses et les travailleurs, les étudiants, les administratrices et les administrateurs et l’État ont un rôle à jouer. Pas les corporations!

136. Les attaques des conservateurs de Harper

137. Sur certains campus, les administratrice et les administrateurs d’Université n’y sont pas allés de main morte avec les manifestantes et les manifestants. Cela a entraîné une vague de solidarité à l'égard des étudiantes et des étudiants qui manifestaient :

* En Colombie-Britannique, UBC – des étudiantes et des étudiants protestant contre la privatisation et la destruction de l’environnement du campus ont été arrêtés- un comité d’appui s’est développé;

* En Alberta, U of A – la protestation étudiante a bloqué la volonté de l’administration d’abolir le comité des représentantes et des représentants élus pour les résidences étudiantes après que ceux-ci aient signé une pétition contre la hausse des frais;

* En Ontario, U of T - l’administration a délibérément fait arrêter 14 militantes et militants sur le campus sous le prétexte de l’occupation du bureau du Président un semaine auparavant, la campagne étudiante qui a suivi a forcée l'arrêt des poursuites et les conditions de remise en liberté;

* Au Québec, UQAM - les manifestations étudiantes (i.e. manifs, affichage) ont été interdites dans le voisinage de tous les campus.

* Au Québec, cegep du Vieux Montréal – il y a eu plus de 100 arrestations lors d’une occupation étudiante, bien que le campus soit réputé depuis longtemps pour sa tolérance à l’égard des manifestations; à travers le Québec, le mouvement étudiant a connu une tolérance réduite envers le militantisme sur les campus.

138. Les organisations de jeunesse du parti conservateur ont aussi augmenté leurs activités d’un cran contre les organisations étudiantes progressistes et de gauche. Depuis quelques temps, les conservateurs ont collecté secrètement des fonds pour financer la course à la direction des associations étudiantes. Au printemps 2009, la jeunesse conservatrice a organisé sur les campus à travers le Canada des sessions de travail à propos :

* de la construction d’associations « larges », travaillant avec les organisations sionistes et anti-avortement sur les campus;

* en attaquant les Groupes de recherche en intérêts publics;

* de la désaffiliation de la Fédération canadienne des étudiants et des étudiantes;

* de façon étonnante, l’organisation d’ateliers sur l’occupation de bureaux de membres du parlement;

* depuis, au moins un député a été pris à intervenir directement dans les élections de l’administration (le député Peter Kent et la Fédération des étudiants de York);

* la jeunesse conservatrice a fait campagne régulièrement contre un Groupe de recherche (PIRGS)- à Guelph et Halifax;

* les conservateurs sont impliqués dans la campagne de désaffiliation de 13 associations de la CFS.

139. La question de la désaffiliation a mené sur l’avant-scène le problème de l’unité étudiante à travers le Canada.

140. L’unité étudiante au Canada anglais

141. La question de la lutte pour l’unité étudiante ne s’aborde pas de la même façon sur les différents campus. Les problèmes politiques ont parfois été réglés par des solutions administratives. Même si le congrès de la CFS a formulé de nouvelles règles sur la désaffiliation, les campagnes contre la CFS se poursuivent et les ennemis de droite contre l’unité étudiante n’ont pas disparu.

142. Il y a aussi des organisations étudiantes de droite qui peuvent « remplir le vacuum » de la CFS – telle que l’Alliance des Associations étudiantes canadiennes (CASA), historiquement une émanation du gouvernement fédéral pour diviser le mouvement étudiant. Les tacticiens des partis libéral et conservateur, prisonniers politiques des grandes entreprises et contents de l’être, considèrent CASA moins utile aujourd’hui. Alors, ils ont mis quelque chose de neuf en branle.

143. Les désaffiliations de campus après-coup ne se font plus dans des campagnes politiques. L’Université Simon Fraser, a servi de test pour cela en 2008. Les étudiantes et les étudiants de droite ont travaillé avec certains critiques gauchistes de la CFS pour se désaffilier dans le contexte d’une administration erronnée par l’association étudiante.

144. Les organisations populaires comme la CFS ont des problèmes internes. Il y a une lutte pour la démocratie et le militantisme. Arguer que la gauche devrait provoquer « quelques » désaffiliations pour « brasser la cage de la CFS » est opportuniste. Affirmer que la CFS ne peut être améliorée fait aussi le jeu de la droite.

145. La contre-offensive passe par la lutte dans des fronts larges et unis. La CFS doit être dirigée démocratiquement par les étudiantes et les étudiants; ceux-ci doivent démontrer leur pouvoir dans l’organisation et diriger la lutte étudiante.

146. C’est une bataille interne que les étudiantes et les étudiants mènent. Les Libéraux ainsi que les sociaux-démocrates du centre et de droite sont prédominants, mais non « hégémoniques » dans la CFS. Les représentantes et les représentants de la Colombie-Britannique, du Manitoba et de Nouvelle-Écosse de la CFS ont fait des critiques à l’égard du NPD. Certains leaders ont déchiré leur carte de membre. Les étudiants comprennent le besoin de militantisme, d’unité et de campagnes au niveau de la base.

147. L’unité étudiante au Québec

148. Même s’il y a plus de militantisme au Québec, l’unité des étudiantes et des étudiants est plus faible qu’au Canada anglais. Au Québec, la CFS a organisé quelques associations étudiantes. Les plus gros joueurs sont la FEUQ pour les étudiantes et les étudiants d’université, la FECQ pour les cegeps, l’ASSÉ et la nouvelle TACEQ qui organise aux deux niveaux. La majorité des associations étudiantes ne sont pas affiliées.

149. L’association étudiante la plus militante est l’ASSÉ. Les FECQ/FEUQ organisent une action annuelle, mais conservent une approche lobbyiste étroite et de compromis sur les problèmes directs immédiats. En 2005, l’ASSÉ a organisé la plus grande mobilisation étudiante au Québec et dans l’histoire canadienne contre les coupures dans les bourses aux étudiants (avec le soutien du mouvement ouvrier et des associations populaires). En 2007, l’ASSÉ a lancé l’appel raté à une grève générale contre le dégel des frais par le gouvernement Charest, et elle a lancé un autre appel aussi raté pour une grève générale illimitée (comme en 2005).

150. L’ASSÉ poursuit sa réflexion sérieusement sur les grèves ratées et sur la stratégie et les tactiques d’aujourd’hui. Le débat tourne autour de la demande pour la gratuité scolaire. Des voix raisonnables au sein de l’ASSÉ démontrent le manque d’unité entre l’ASSÉ et la FECQ/FEUQ, freinant d’ailleurs la cause.

151. L’atteinte de leurs objectifs pour les étudiantes et les étudiants du Québec repose sur leur besoin d’unité. Il est aussi nécessaire que la FECQ/FEUQ s’appuie sur une plus grande approche de masse et de lutte de classe.

152. Les étudiants autochtones

153. L’éducation est un droit humain – et pour les Premières Nations un droit inclus dans les Traités. Cependant, en plus des politiques permanentes néocoloniales contre les peuples autochtones, le gouvernement fédéral a imposé en 1996 un plafond de 2% sur le financement de tous les services de base et essentiels, brisant ainsi les Traités. De plus en plus de jeunes autochtones recherchent un diplôme. Plus de la moitié de la population autochtone a moins de 25 ans. Il y a une longue liste d’attente pour les Premières Nations avant d’accéder à l’éducation postsecondaire. Les peuples sans-statut et métis ne reçoivent aucun financement, subissant pourtant le même racisme.

154. Les politiques contre les étudiantes et les étudiants autochtones affectent tout le mouvement étudiant. Même si des centres étudiants pour les Premières Nations et des associations sont établis dans la plupart des universités à travers le pays, ils doivent lutter pour du financement. Il n’y a qu’une université des Premières Nations au Canada, en Saskatchewan, que les conservateurs de Harper s’apprêtent à fermer. La YCL-LJC condamne cette fermeture. La YCL-LJC exige l’abolition du plafond de financement, une action urgente pour améliorer les conditions sociales et économiques des peuples autochtones et la pleine reconnaissance de la souveraineté et de l’autogouvernement des nations autochtones.

155. L’unité étudiante pancanadienne

156. La nécessité pour une organisation unifiée pour toutes les étudiantes et tous les étudiants au niveau fédéral est objectivement réelle. Des tentatives pour unir la CFS et les étudiantes et les étudiants autochtones ont été faites. La CFS a fait campagne en faveur de solutions pour les problèmes des étudiantes et des étudiants autochtones au Manitoba notamment, et ils ont condamné l’approche constante du Ministère des Affaires Indiennes et du Nord en matière d’éducation autochtone, et la fermeture de l’Université des Premières nations.

157. L’unité entre les étudiantes et les étudiants du Canada anglais et du Québec est sporadique et limitée. Superficiellement, la langue est une barrière à une plus grande communication. En fait, c’est un problème politique relié à la question nationale qui se reflète dans ces tactiques :

* Les bourses du millénaire n’avaient pas la faveur de la CFS puisqu’inefficaces;

* pour les étudiantes et les étudiants du Québec cependant, c’était un avantage par rapport à leur système de prêts.;

* la « loi sur l’éducation postsecondaire » d’abord proposée par la CFS et la CAUT et maintenant adoptée par le Nouveau parti démocratique ne contient aucune disposition spéciale pour les étudiantes et les étudiants du Québec et les étudiantes et les étudiants autochtones.

158. Bien que le nationalisme étroit (encouragé par le parti québécois) décourage certains étudiantes et étudiants québécois d’actions pancanadiennes au niveau fédéral, le principal problème est le chauvinisme au Canada anglais. Beaucoup d’étudiantes et d'étudinats canadiens-anglais parlent comme s’il n’y avait pas de batailles étudiantes militantes au Québec.

159. À nos yeux, il n’y a qu’une classe ouvrière au-delà des nations distinctes au Canada. La situation a changé depuis l’époque où l’Union nationale des étudiants, alors qu’il y avait une organisation des étudiantes et des étudiants du Québec (ANEEQ). Si la CFS devait se retirer du Québec, ce n’est pas certain que quelque chose de bon résulterait de son absence. Il y a beaucoup d’associations étudiantes d’expression anglaise qui ne sont pas organisées dans un mouvement étudiant progressiste. Une première approche pourrait être réalisée par la CFS et elle devrait développer sa propre position pour reconnaitre le caractère multinational du Canada.

160. Mesures à prendre

1. Que la YCL-LJC continue de se concentrer sur l’unité étudiante postsecondaire, à travers :

1. a. Les conférences de militantes et militants étudiants et les Appels;

1. b. La participation des membres dans les élections étudiantes;

1. c. Le nouveau Comité central publiera ses propres perspectives sur l’éducation postsecondaire, incluant notre demande pour l’élimination des frais de scolarité et des frais de subsistance pour les étudiants, et la liaison avec les problèmes de classe sociale;

2. Les luttes dans les écoles secondaires

2.a. Que la YCL-LJC continue de s’engager dans les campagnes, mobilisations, forums et autres actions politiques des étudiants de niveau secondaire;

2.b. Que le nouveau Comité central publie des brochures pour les étudiantes et les étudiants de niveau secondaire, un bulletin ou autre publication.

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